vendredi 28 octobre 2016

Entaillure




Ce jour là où j'ai
Frôlé ton gant de velours,
J'ai entaillé à mon insu
La dorure des convenances
Sur ta peau
Par mégarde
J'ai croqué la pomme
-fendue comme un sourire-
Qui te sert de cœur

Gant de velours —
Moirure pourpre que tu laisses échapper
De tes doigts
Pour mieux me ramoner les veines
Obstruées de néant

Te voilà réduit
En un globule circulant dans mon sang
Quand je te respire
Toutes les bleuités de ta voix se confondent
Je n'entends plus que tes yeux
Dans le crépitement de tes tropes
Entre mes doigts
Réduits à palper l'ivresse turgescente
Sous l'insurrection des pores

Toi, l'irréel —
Rêverie cristalline que je goûte
Par la fissure d'où le bonheur se tréfile
Bouche à bouche
S'entame la traversée
De l'illusion funambule
Qui irrigue nos cils
Jusqu'à la dernière goutte du soleil diluvien

Il pleut des cordes ignées
Dans nos joies troglodytes

Et sous l'averse,
Au détour d'une commissure,
Je te pardonne
D'inexister


jeudi 27 octobre 2016

Etini Neya


Donne-moi cette flûte et chante
La plus belle des logorrhées.
Quand la flûte geint, elle enchante
Et rend la vie au sang figé.

En hiver, prends-tu pour demeure
La forêt, ce charmant palais?
Longes-tu le ruisseau clameur?
Foules-tu, pieds nus, ses galets?

Sais-tu te nourrir de lumière
Jusqu'à l'ultime satiété?
Lécher le vin, dans la prière
Des chairs férues, est piété.

T'assieds-tu à l'ombre des vignes,
L'après-midi dans ce décor?
Les grappes gorgées te font signe,
Luisant comme des lustres d'or.

T'étends-tu sur l'herbe le soir?
Ton drap est-il air et quiétude,
Quand ta rancœur, au moelleux noir,
Se sucre de mansuétude?

Donne-moi cette flûte et chante
Ce chant qui embaume les cœurs.
La flûte geint comme l'amante
Fend l'inertie, d'un cri rieur.


lundi 10 octobre 2016

Le Pont



Sur un pont
plié en deux
de rire
j'étudie l'impossibilité des formes
sur l'étendue d'un pétale
échoué dans le cratère de l'attente.

Dans un espace normé infiniment fini
qui se ressemblent s'assemblent
en sursis
ils vivent heureux
enfouis entre deux neurones
dans la pico-dimension de leur alcôve.

Dans la brume assoiffée
les doigts gouttent
les gorges s'assèchent
en tyroliennes
vociférées sur le toit d'un abîme
qui s'érige profondément,
s'engouffre en gratte-ciel,
s’empiffre de nuages,
coule en bruine et plaide pour
l'incontinence lacrymale des félicités dérobées.

Sur ce pont moqueur
je calcule
les chances de déverrouiller une porte
avec un jet de dés
quand la patience grince
à une minute près de l'infini,
nous aurons encore, en abreuvement,
quelques perles de mots liquides
et tout le désert pour faire des sabliers.